Les réseaux sociaux au service de l’animation de la vie coopérative

Organisée dans le cadre de l'assemblée générale de la Fédération nationale des sociétés coopératives d'Hlm, la table ronde, animée par Hervé PARENT (consultant HP Conseils), accueillait les personnalités suivantes :

Pierre-Yves ANTRAS, directeur général de Haute-Savoie Habitat et d’Idéis
Charles BERDUGO, président de maresidence.fr
Thierry MARCOU, Fédération Internet Nouvelle Génération
Pascal MASSON, directeur général d’Habitation Familiale
 
Le support de présentation de cette séquence peut être téléchargé en cliquant ici.

Marie-Noëlle LIENEMANN
 
Nous voyons se développer un peu partout en France des méthodes qui visent à utiliser les réseaux sociaux ou Internet pour mieux faire vivre le lien entre les habitants et les structures (bailleurs sociaux ou coopératives). Nous disposons aussi de plus en plus de technologies qui, sur un même support, permettent l’accès à de multiples services et informations. Parfois, les coopératives ont commencé à mettre en place des comptes Facebook ou Twitter. Nous avons donc pensé qu’il était utile de réfléchir ensemble à l’usage qui peut être fait des réseaux sociaux.
 
Hervé PARENT
 
Il est souvent dit qu’Internet est une révolution. C’est un lieu commun mais c’est très important. Nous ne parlons aujourd’hui des réseaux sociaux que parce qu’Internet est une vraie révolution par la création de connaissances et leur diffusion à tous. Google dit qu’il se crée plus d’informations chaque jour sur Internet qu’il ne s’en est créée entre l’aube de l’humanité et l’an 2000. Cette vague nous touche tous. En France, nous comptons 41 millions d’internautes qui passent en moyenne 27 heures par mois sur Internet.
 

D’après Médiamétrie, qui a étudié une centaine de sites du secteur immobilier (portails d’annonces, sites des promoteurs, sites des réseaux d’agents immobiliers, administrateurs de biens etc.), ces sites ont reçu treize millions de visiteurs uniques en janvier, ce qui est considérable. Ces visites sur des sites immobiliers sont en constante progression. Ces éléments montrent que le mariage Internet/immobilier fonctionne bien, et que tous les Français ont le réflexe Internet lorsqu’ils veulent vendre, acheter ou rechercher une location saisonnière. Nous constatons aussi qu’il est difficile pour un promoteur d’être performant sur Internet. Etre présent sur Internet est complexe, technique et demande de la réflexion mais celui qui n’y est pas perd pied commercialement.
 
78 % des internautes utilisent les réseaux sociaux. Vingt millions de personnes ont un profil Facebook dont onze millions postent un message chaque jour. Elles y passent quatre heures par mois en moyenne. Toutes les tranches d’âge sont concernées. D’après Facebook, la moitié des 21 millions d’utilisateurs ont entre 18 et 35 ans. Le phénomène le plus marquant des derniers mois est l’arrivée des seniors qui ouvrent un compte Facebook pour dialoguer avec leurs petits-enfants. Chaque utilisateur a en moyenne 130 « amis ». Chaque profil personnel se déclare « fan » de neuf sociétés.
 
Côté visiteurs, plus de 26 millions de personnes vont tous les mois sur Facebook, soit à peine moins que sur Google et Microsoft. Aux Etats-Unis, Facebook est même devant Google. En conclusion, Facebook n’est pas un phénomène de mode qui touche les adolescents, c’est une tendance bien plus lourde.
 
Les réseaux sociaux sont arrivés dans l’immobilier par Century 21. Cette société a en effet constaté que les agents immobiliers américains réalisaient 30 % de leur activité sur Facebook et qu’il fallait suivre le mouvement. Depuis, les articles, les ouvrages, les formations ou les conférences pour les réseaux d’agents immobiliers, les administrateurs de biens, les promoteurs, les bailleurs sociaux ou les sociétés foncières se multiplient. Cependant, les « apôtres » qui proposent des conférences sur les réseaux sociaux sont en général des prestataires qui ont quelque chose à vendre.
 
La notion de réseau social est un concept un peu fourre-tout dans lequel on retrouve aussi bien des sites de rencontre que des sites de partage de vidéos. Dans le secteur de l’immobilier, distinguons les réseaux grand public (Facebook, Twitter), les réseaux de proximité (maresidence.fr), les réseaux de professionnels (Viadeo, Linkedin) et les réseaux strictement immobiliers. Il existe environ six réseaux d’immobilier d’entreprise en France qui ont 1 500 à 2 000 membres mais il s’y passe peu de chose. En comparaison, le réseau des agents immobiliers des Etats-Unis compte 50 000 membres et est très actif.
 
Comment passer de la relation client à la gestion de communauté ? Tous les professionnels font grise mine devant une telle perspective car les réseaux sociaux supposent le passage d’une communication unidirectionnelle à une conversation. Jusqu’ici, vous pouviez adresser à vos clients un message cadré. Désormais, chacun peut réagir sans que vous le sachiez forcément.
 
L’émergence des réseaux sociaux a ensuite induit une perte de crédibilité des institutions. Plus personne ne croit les grandes institutions. Une opinion anonyme pèse plus que le message d’une marque.
 
Une autre difficulté est que les réseaux sociaux sont synonymes d’une amplification de la mauvaise humeur des clients sans possibilité d’y répondre. Enfin, dans les grandes sociétés surtout, le fait que les collaborateurs puissent s’exprimer de façon incontrôlable peut poser problème. Pour une agence immobilière par exemple, il peut être difficile de gérer le fait qu’un collaborateur parle sur sa page Facebook à la fois des produits à vendre et de sa vie privée. Une telle confusion ne plaît généralement pas aux entreprises.
 
Quelles que soient les difficultés, les entreprises ne pourront pas faire l’impasse sur les réseaux sociaux : leur succès est mondial, ils sont en phase avec les mouvements de fond de la société (valeurs de partage et d’échange) et vos coopérateurs sont déjà sur Facebook. Les réseaux sociaux créent donc une opportunité extraordinaire de créer et d’entretenir un dialogue avec vos clients et de mieux travailler.
 
Cependant, les incertitudes sont encore grandes sur le bénéfice que vous pouvez attendre des réseaux sociaux. Les questions qui reviennent souvent portent sur ce que les réseaux sociaux coûtent et rapportent, sur le temps qu’il faut y consacrer, sur le choix d’un réseau ouvert ou fermé et sur le lien à mettre en place avec le site Internet. Malgré l’absence de certitudes, quelques débuts de réponses peuvent être apportés. Les personnes qui sont très présentes sur les réseaux sociaux nous disent qu’il faut s’appuyer sur un community manager, une personne qui contrôle et gère le réseau social. Selon la taille de l’entreprise, il peut s’agir d’une personne qui travaille une demi-journée par semaine ou d’une équipe entière. Personne ensuite n’est capable de mesurer ce que coûtent et rapportent les réseaux sociaux. Il est par ailleurs certain que l’institution doit rester en retrait d’une conversation entre pairs. Autre certitude, le réseau doit atteindre une masse critique pour exister, pour que les personnes aient des choses à se dire. Il est enfin évident qu’avec le réseau social, l’entreprise tisse sa toile aujourd’hui pour en récolter les fruits plus tard.
 
Les entreprises peuvent finalement avoir deux certitudes : elles doivent être présentes dans les réseaux sociaux et sur Internet, même de façon passive, sinon d’autres le feront à leur place ; elles doivent également assurer une veille sur leur marque pour savoir ce qui se dit sur l’entreprise et pouvoir y répondre. En conclusion, un réseau social sur Internet est un outil formidable pour animer une communauté existante. Ce n’est pas un outil pour créer artificiellement une communauté autour d’une entreprise. Créer une page Facebook pour une agence immobilière ne sert pas à grand-chose. En revanche, mettre à disposition d’une communauté une plate-forme technique et l’animer permet d’obtenir une qualité de relation incomparable avec cette communauté. Vous devez donc vous demander s’il existe une communauté réelle ou potentielle autour de vos coopératives et si vous avez suffisamment d’informations à échanger. Si la réponse est oui, votre réseau sur Internet jouera un rôle important et très valorisant pour votre coopérative.
 
Pierre-Yves ANTRAS
 
Peu d’organismes Hlm ont à ce jour créé une page Facebook. Nous l’avons fait mais je n’évoquerai pas seulement cette page Facebook car elle s’inscrit dans une démarche plus globale. Haute-Savoie Habitat est l’Ophlm de Haute-Savoie et le premier bailleur du département avec 15 000 logements. A la base de notre stratégie, nous avons fait le constat qu’il n’existe plus une seule manière de communiquer. Certains de nos locataires nous adressent des courriers, d’autres ne les ouvrent même plus. Certains nous téléphonent, d’autres nous envoient des e-mails. Nous avons donc fait le choix d’une communication qui s’inscrit dans une stratégie au service de la proximité.
 
Nous ne communiquons pas pour communiquer mais pour mettre des outils au service de la proximité, pour permettre aux équipes de terrain d’être les plus efficaces possible.
 
La première étape marquante dans notre organisation a été la création il y a six ans d’un centre de relation clientèle qui ne voulait pas seulement être un centre d’appels. L’objectif principal était d’aller jusqu’au bout de l’information à donner à nos clients locataires. En effet, les organismes sont souvent critiqués car ils ne communiquent pas sur leurs actions. Ainsi, nous ne prévenons pas les locataires quand une entreprise diffère son intervention. Pour corriger ce problème, le centre de relation clientèle gère autant d’appels entrants (700 appels par jour qui entraînent l’ouverture d’une affaire) que d’appels sortants pour informer les locataires sur le suivi des affaires. La création de ce centre a été fondamentale dans la structuration d’une approche qualité.
 
Dans une seconde étape, nous avons créé un site Extranet sur lequel le locataire peut suivre son compte financier et payer son loyer mais où il peut aussi trouver des informations sur son immeuble, son groupe, sa résidence. Chaque locataire a accès s’il le souhaite à une page individualisée où il retrouve l’information qui le concerne en quasi-temps réel grâce à un tableau d’affichage virtuel. Il y trouve aussi des informations sur un événement particulier. Dès qu’un ascenseur est en panne par exemple, le centre de relation clientèle crée une information sur le site.
 
La troisième étape – l’arrivée de Facebook – s’est inscrite dans la continuité des deux premières. Nous nous sommes en effet dit que si nous ne maîtrisions pas les informations sur notre société sur Internet, d’autres le feraient à notre place. D’ailleurs, en tapant le nom de notre organisme sur un moteur de recherche, je me suis rendu compte qu’un groupe de locataires avait à une époque utilisé ce réseau social pour discuter d’une panne de douches. Créer une page Facebook nous a semblé être la meilleure solution pour éviter qu’un réseau se structure contre nous. A ce moment, nous savions que nous prenions des risques, que nous partions un peu à l’aveuglette mais nous avions toujours la possibilité en cas de débordement de fermer la page.
 
Notre page fonctionne depuis pratiquement sept mois. C’est une page ouverte, sur laquelle tous ceux qui sont « fans » peuvent s’exprimer. Pour devenir « fan », il faut cliquer sur le bouton « j’aime ». Symboliquement, c’est une belle chose que 141 personnes aient choisi de dire qu’elles aiment Haute-Savoie Habitat. Toutefois, ces personnes peuvent avoir voulu devenir « fans » pour ensuite dire dans le texte qu’elles n’aiment pas Haute-Savoie Habitat. Concrètement, cette page rassemble des informations de notre part et de la part des locataires, des questionnements, des candidatures de locataires ou d’accédants potentiels. Depuis sept mois, nous testons cet outil, nous recherchons une forme d’ambiance. Le plus important travail a été de trouver comment communiquer sur Facebook. Il faut trouver un style, une manière de répondre.
 
Récemment, j’ai été heureux de lire le message d’une personne qui appréciait que les locataires soient considérés grâce à Facebook comme des personnes et non comme des numéros de dossier. Cette opinion ne reflète pas forcément celles de tous nos clients mais elle illustre un attendu en termes de communication et de valorisation du locataire auquel nous avons semble-t-il réussi à répondre.
 
Nous avons parallèlement créé un site sur Twitter. Notre objectif est que chaque immeuble dispose d’une page spécifique sur Twitter, où chaque locataire qui le souhaite pourra retrouver des informations en temps réel sur l’immeuble, alimentée par exemple par le responsable de site.
 
Charles BERDUGO
 
Je vais vous présenter le réseau social de proximité maresidence.fr. La particularité des réseaux sociaux de proximité est qu’ils sont ancrés dans le territoire, que ce soit à l’échelle d’une ville, d’un quartier, d’une rue ou d’un immeuble. Un marché énorme s’ouvre en matière de relations dans la proximité car dans un environnement mondialisé et trépidant, nous avons tous besoin d’une identité territoriale. Maresidence.fr utilise les mêmes technologies et la même démarche que Facebook – information proactive, approche participative et collaborative – mais s’inscrit dans la vraie vie, dans une relation réelle et quotidienne. Ainsi, une personne qui a besoin d’une perceuse peut utiliser le réseau social pour faire une demande à l’échelle de son immeuble. Elle n’est pas obligée de solliciter directement son voisin et peut obtenir une réponse de toute personne qui souhaitera l’aider.
 
A ce moment, une rencontre réelle doit avoir lieu. D’autres demandes peuvent être effectuées à l’échelle de la rue ou du quartier : échanger des cours de poterie contre des cours de mathématiques, chercher une baby-sitter etc. Tous ces échanges sont donc impulsés par le réseau social mais se prolongent dans la vie réelle.
 
L’élément fondateur du réseau social de proximité est l’envie de solidarité. En rendant disponible l’information sur les besoins des uns et des autres et en permettant la mise en relation, le réseau social vient servir le besoin de relation sociale, d’entraide et de solidarité. Il est aussi important de rappeler que le succès des réseaux sociaux s’inscrit dans un besoin de reconnaissance.
 
Evidemment, ce besoin de reconnaissance prend une ampleur toute particulière dans les lieux de vie puisque la reconnaissance de ses pairs et voisins construit l’identité de chacun.
 
La première fonction de maresidence.fr est bien de mettre les voisins en relation pour échanger tout un ensemble de services comme il pouvait s’en échanger dans les villages de nos grands-parents. Mais c’est aussi un support d’information proactive où les habitants peuvent trouver des informations sans avoir besoin de les rechercher. Cette seconde dimension représente une double forme de reconnaissance ; ainsi, les personnes sont tout d’abord reconnues comme ayant des attentes légitimes d’informations ; elles ont ensuite la possibilité de s’exprimer. Que le maire de ma ville, mon bailleur ou mon promoteur me demande mon avis sur tel ou tel choix est évidemment un élément fort de reconnaissance.
 
Le réseau social de proximité sert donc les besoins des acteurs de la proximité, notamment les promoteurs et les gestionnaires. Ces acteurs ont la possibilité d’entrer dans le fil d’activité des habitants pour les informer ou les consulter et de créer du lien social dans leur bâti.
 
La mise en place de maresidence.fr a demandé cinq ans de travaux et des tests sur plus de 20 000 immeubles. Le site est aujourd’hui en fonction à l’intérieur des villes et débute son déploiement national. Il répond au besoin de chacun de constituer une communauté à son échelle. Le maire veut constituer une communauté à l’échelle des habitants de la ville. Le promoteur veut constituer une communauté d’acquéreurs. En créant du lien social à l’intérieur de son bâti et en proposant à ses acquéreurs un outil leur permettant de créer leurs nouvelles relations de voisinage et d’intégrer leur nouveau lieu de vie, le promoteur accroît son image de marque. Il peut aussi injecter de l’information proactive sur l’évolution du bâti, sur les étapes du chantier, améliorant ainsi sa relation clients. En apportant des réponses sur un incident touchant les parties communes par exemple, le promoteur évite de recevoir des dizaines de coups de téléphone sur le même sujet et économise du temps.
 
Evidemment, cet espace est confidentiel et non accessible à d’autres. Dans un souci de confiance et de respect de la proximité, l’espace de l’immeuble est un espace étanche. Il est hors de question qu’il soit visible des habitants du quartier ou de la ville. S’il le souhaite, un gestionnaire peut uniquement injecter du lien social à l’intérieur de son bâti en proposant aux habitants d’adhérer à maresidence.fr. Mais il peut aussi aller plus loin en utilisant le site comme un canal d’information pour adresser en temps réel de l’information à ses adhérents et répondre à leurs demandes.
 
En conclusion, nous croyons fermement à un réseau social de proximité français qui porte un certain nombre de valeurs et qui sert la reconnaissance dans les lieux de vie, dans la vie réelle. Nous sommes maintenant partis pour assurer notre déploiement national.
 
Thierry MARCOU
 
Bonjour à tous. Je travaille dans une association qui s’appelle la FING, Fondation Internet Nouvelle Génération, et qui existe depuis dix ans. Nous nous intéressons au numérique sous un angle social. Nous étudions la manière dont les usages du numérique transforment la société. En ce qui me concerne, j’ai piloté différents travaux sur la ville et le numérique. En ce moment, je travaille sur le lien entre l’habitat et les pratiques numériques des habitants.
 
Les usages des réseaux sociaux sont variés. Certains permettent de favoriser et fluidifier des rencontres de personne à personne. D’autres permettent d’organiser et mieux exploiter des relations professionnelles. D’autres encore permettent de partager des goûts et des productions. La plate-forme de partage de photos Flickr qui contient aujourd’hui des milliards de photographies en est un bon exemple. Flickr permet d’abord de partager des photos entre amis mais savez-vous qu’en exploitant les photographies de baleines disponibles sur la plate-forme, des scientifiques avaient réussi à démontrer qu’une baleine avait fait un voyage extraordinaire d’un bout à l’autre du monde ?
 
Cet exemple montre que les réseaux sociaux et leur contenu peuvent changer la manière dont nous pouvons mieux connaître notre monde et notre société.
 
Il existe différentes manières d’exister dans les réseaux sociaux. Certaines personnes sont dans la projection et pratiquent des jeux en réseau. Le jeu World of Warcraft par exemple rassemble des dizaines de millions de joueurs dans le monde. Ces joueurs se projettent dans un personnage, dans une identité virtuelle. En France, des millions de personnes participent tous les soirs à des campagnes de guerre qui peuvent durer plusieurs mois. D’autres réseaux sociaux sont plus axés sur le faire, l’agir, le collectif. L’exemple le plus emblématique est Wikipédia. Wikipédia est une encyclopédie en ligne qui s’appuie sur des millions de contributeurs et de correcteurs et qui est consultée par des centaines de millions de personnes. Wikipédia est bien un réseau social de personnes qui coproduisent et font vivre ensemble un nouveau dispositif de partage de la connaissance.
 
Dans le cadre de notre programme Habitants connectés, nous travaillons avec Promotelec, avec une des acteurs de la valorisation de l’innovation dans l’ameublement ou encore avec Renault. En effet, il existe un lien très intéressant entre la voiture et l’habitat. Ce lien est d’autant plus intéressant lorsqu’il est question de voitures électriques et de maisons qui produisent plus d’énergie qu’elles n’en consomment. En matière de numérique, s’il est évident qu’une maison connectée permet de gagner du temps, les acteurs de la domotique nous disent que leurs produits n’ont pas de succès.
 
Pourtant, il n’y a jamais eu autant de numérique dans la maison (ordinateurs, téléphones mobiles, box, jeux vidéo, objets robotisés).
 
Nous pouvons observer certains signes des évolutions à l’œuvre autour du lien entre numérique et habitat. Citons par exemple le réseau social couchsurfing qui permet de voyager dans le monde en s’invitant mutuellement à dormir sur son canapé. Un million de canapés sont disponibles dans 300 pays et 80 000 villes dans le monde. Ce système qui permet aux jeunes de voyager à moindres frais a un succès absolument phénoménal. C’est pour nous un phénomène intéressant car il pointe de nouvelles formes d’hospitalité. Le numérique n’est pas donc pas seulement orienté vers l’optimisation des process et la productivité. Il favorise aussi l’innovation sociale et culturelle.
 
Il est passionnant de voir à quel point les réseaux sociaux transforment la manière de cuisiner. Vous ne pouvez pas imaginer le nombre de blogs de cuisine qui existent et le succès qu’ils rencontrent.
 
De nombreuses personnes cuisinent de plus en plus en étant connectées à leur réseau social, en allant cherchant des conseils auprès de leurs amis pour l’achat des ingrédients ou les techniques de cuisson. Cette transformation de la cuisine par les réseaux sociaux est un phénomène tout à fait intéressant.
 
J’aimerais ensuite citer le cas plus marginal d’un couple qui a construit une maison bioclimatique. Sur leur blog, ils ont documenté toutes les étapes de la construction, des études au choix des matériaux. Ils ont aussi installé dans leur maison des capteurs et des dispositifs de mesure pour réaliser un monitoring énergétique dont ils rendent compte sur leur blog. Ce blog très consulté est une manière de partager un projet important pour chacun, celui de construire sa maison et son foyer. Aujourd’hui, ce processus peut prendre une nouvelle dimension grâce aux réseaux sociaux.
 
Dernier exemple, tous les spécialistes de la chose urbaine pointent le retour du végétal dans la ville. En Angleterre et aux Etats-Unis, les réseaux sociaux de jardiniers et de jardinage sont très nombreux. Ils permettent notamment de mettre en relation des personnes qui recherchent un morceau de terrain et des personnes qui en possèdent un mais qui n’en font rien. Cette mise en relation permet de développer le jardinage urbain. On constate aussi dans le monde un mouvement de colonisation des terrasses et toits plats. Leur végétalisation est un véritable phénomène qui s’appuie souvent sur de l’innovation sociale, sur le partage de ces jardins. Nous constatons donc une friction intéressante entre une donnée de base – cultiver la nourriture que l’on mangera ensemble –, la ville, les réseaux sociaux et les nouvelles pratiques de don et de partage.
 
Pascal MASSON
 
Bonsoir, je viens témoigner devant vous de la manière dont nous utilisons Internet et les outils dématérialisés chez Habitation Familiale. Au départ, notre site Internet était plutôt une vitrine de notoriété et un site d’information générale. Au fur et à mesure, nous nous sommes rendu compte que nous devions disposer sur ce site d’une information soutenue et actualisée pour garder cette notoriété en place et pour bien faire notre métier de commerçants. Habitation Familiale a en effet essentiellement une activité d’accession à la propriété.
 
En trois ans, nous sommes passés de 30 à plus de 60 % de contacts commerciaux sur Internet. Une telle évolution conduit à s’interroger sur les dépenses de communication et sur la publicité de nos opérations. En effet, l’information diffusée par Internet est gratuite.
 
Nous nous rendons aussi compte qu’Internet est vecteur de relations avec nos partenaires, qu’ils soient entreprises, architectes, donneurs d’ordres. Les entreprises peuvent par exemple s’abonner en ligne à nos appels d’offres. Nous avons également constaté qu’il était essentiel de proposer en permanence une information commerciale à jour mais aussi de répondre aux questions que nos clients peuvent se poser. Nous présentons donc régulièrement l’avancée de nos chantiers. Nos clients qui sont un peu éloignés attendent avec impatience de découvrir des informations et des photographies aux différentes phases des chantiers.
 
Nous avons parallèlement un métier du syndic. Nous avons donc mis en place un Extranet où chaque copropriétaire peut avec un accès sécurisé consulter ses comptes et toutes les informations sur la copropriété (assemblées générales, comptes, interventions d’entreprises).
 
Ces outils sont bien plus modestes que tout ce qui a été présenté précédemment mais ils nous permettent de bâtir du lien et d’être sources de données pour nos partenaires et nos clients. Nous en avons profité pour mettre à disposition de nos administrateurs sur Internet tous les éléments écrits utiles (conseils d’administration, bureaux, rapports d’activité).
 
Un participant
 
Monsieur Antras, quel a été le coût en investissement de votre centre de relation clientèle et que vous a-t-il rapporté ?
 
Pierre-Yves ANTRAS
 
Il est très difficile de chiffrer ce que peut rapporter un engagement de qualité de service. Nous ne pouvons qu’observer des tendances favorables en termes de réaction et de satisfaction des locataires. Il y a six ans, la mise en place du centre nous a coûté 200 000 euros la première année.
 
Globalement, cette création nous a apporté des réactions positives de la part des locataires mais surtout une nouvelle organisation beaucoup plus centrée sur la traçabilité. A chaque instant, nous savons où en est une demande et comment elle est traitée.
 
Un participant
 
Vous avez amélioré votre activité. Vous avez réorganisé votre chaîne interne de traitement des réclamations, redéfini des postes et embauché du personnel. Votre système a l’air tellement efficace que je me pose vraiment la question du coût.
 
Pierre-Yves ANTRAS
 
Effectivement, nous avons structuré tout notre système en termes de demande. Toutes les requêtes, qu’il soit question de locatif ou d’accession, qu’elles viennent d’un partenaire ou d’un client, sont traitées par le centre grâce à une équipe de douze personnes. La plupart d’entre elles occupaient avant des postes d’accueil dans les agences. Ces postes sont aujourd’hui moins fréquents dans les agences car tout est concentré dans le centre, ce qui nous permet de maîtriser la manière dont nous répondons aux questions qui nous sont posées. Auparavant, le métier de réponse téléphonique était assuré dans les agences en plus des autres tâches. Ce métier n’était pas reconnu en tant que tel. Il est pourtant fondamental. Avant la création du centre de relation clientèle, nous demandions à la personne de l’accueil de répondre au téléphone sans nous poser la question de la qualité et de la fiabilité de la réponse. Nous recevons aujourd’hui 600 à 700 appels par jour.
 
Ces appels existaient auparavant mais ils étaient dilués dans toutes les agences. A ces appels initiaux s’ajoutaient les appels de relance. Ces relances ont de moins en moins lieu d’être puisque c’est nous qui informons nos clients.
 
Le centre de relation clientèle nous permet de centraliser notre traçabilité et notre organisation, y compris sur les relances internes. Les opérateurs peuvent contacter les agences pour signaler un retard sur telle ou telle action par rapport à ce qui a été annoncé au client. Le centre est aussi un outil au service de la proximité. Un responsable de site peut très bien appeler le centre pour signaler un problème et faire créer une affaire. Avant de clôturer une affaire, nous veillons à vérifier auprès des locataires que la situation est réglée pour eux. Dans un certain nombre de cas, nous découvrons qu’un équipement qui était censé être réparé ne l’est pas dans la réalité. Au-delà de cette logique de contrôle, nous engageons aujourd’hui une phase de cotation pour établir auprès de nos clients si l’intervention s’est bien passée. Notre objectif est d’arriver aussi à une cotation au niveau des entreprises sous-traitantes.
 
Marie-Noëlle LIENEMANN
 
Certaines personnes visitent vos sites de leur propre initiative, mais il me semble que l’un des intérêts des réseaux sociaux est de pouvoir interpeller le public de façon un peu ciblée. Lorsque par exemple vous apprenez sur maresidence.fr qu’une amicale organise une fête de quartier, comment pouvez-vous vous adresser aux participants en évitant un coup de téléphone trop intrusif ? Avec Internet, les personnes peuvent en un clic dire si une proposition les intéresse ou non. Voyez-vous un intérêt à interpeller ainsi les personnes ? On a longtemps craint que Facebook auto-organise les personnes par centres d’intérêt. En réalité, on se rend compte qu’on clique sur des items sur lesquels on aurait jamais pensé cliquer, simplement parce qu’une personne nous a envoyé tel ou tel article. Sur ce modèle, nos coopératives peuvent peut-être trouver des solutions pour élargir leur clientèle et créer plus de vie dans les résidences.
 
Pierre-Yves ANTRAS
 
Avec les réseaux sociaux, nous découvrons que les réactions des différents contributeurs ne sont pas du tout en lien avec ce que nous pouvions imaginer. Nous constatons par exemple que tel type d’information intéresse un grand nombre de personnes. En tant qu’administrateurs, nous disposons de statistiques très précises sur la manière dont les informations sont lues et répercutées. Les résultats ne sont jamais ceux que nous attendions.
 
Hervé PARENT
 
Attention, vous ne pouvez pas inscrire les personnes à un réseau social sans qu’elles le sachent ou contre leur volonté. Il faut donc trouver des moyens pour que les personnes viennent d’elles-mêmes sur votre réseau social. De nombreuses sociétés qui ont décidé de communiquer sur Facebook se sont rendu compte au bout de quelques mois qu’elles ne recevaient aucun fan. Elles ont donc dû trouver des moyens artificiels (loteries, concours) pour que les personnes viennent à elles mais ces personnes sont de faux amis. Le point clé est de trouver des solutions pour que vos clients se déclarent amis ou fans et intègrent vos réseaux.
 
Merci à tous pour votre attention.