Les interventions de MN Lienemann et Cécile Duflot devant l'assemblée générale des coop Hlm

Marie-Noëlle Lienemann

Je remercie Madame la Ministre de sa présence, ainsi que Monsieur le Président de l’Union sociale pour l’Habitat et les Présidents ou représentants des différentes structures.

Les résultats de la famille des coopératives Hlm sont en progression cette année par rapport à ceux de l’année passée. La famille des coopératives représente une production de 7 000 à 8 000 logements par an. Elle a retrouvé un étiage plutôt élevé de sa production, légèrement augmentée dans le locatif et plus soutenue dans l’accession.
 
La situation reste néanmoins fragile pour permettre de maintenir un haut niveau de production, en s’attachant au caractère social de la production et à la qualité environnementale. Les deux tiers de la production respectent déjà les normes RT 2012 avant même qu’elles s’imposent. La Fédération apprécie le climat et les décisions prises depuis l’arrivée de Madame la Ministre. Pour prometteurs qu’ils soient, le passage à l’acte le plus rapide possible d’une série d’annonces positives est néanmoins nécessaire :
 
•    Les coopératives Hlm souhaitent non seulement voir et obtenir les terrains publics afin d’y construire, mais également que les opérateurs Hlm soient les premiers aménageurs de ces opérations. le mouvement Hlm ne doit pas être le « bagage accompagné » des opérateurs privés. Les coopératives Hlm sont pour la mixité des intervenants et la mixité sociale, et pensent pouvoir garantir cette mixité des intervenants en étant les chefs de file,
 
•    Elles approuvent l’abandon du prélèvement mis en place par le précédent gouvernement, même s’il ne commencera qu’à partir de 2014. Pour ceux qui considéreraient qu’il s’agit d’un dû, un récent rapport montre que dans les autres pays européens, le logement social dans ces périodes d’austérité est frappé de plein fouet,
 
•    Les coopératives ont obtenu une légère augmentation de l’aide à la pierre et attendent avec impatience que le milliard issu du 1 % soit rapidement signé avec la Caisse des Dépôts et que le Président de l’USH puisse signer rapidement un accord sur la manière de l’utiliser,
 
•    Je salue l’engagement personnel de Madame la Ministre en soutien à l’action de l’USH sur la TVA à 5 % mais je regrette les lenteurs de Bercy à comprendre l’impératif social de cette mesure et son dynamisme économique, pour laquelle il a fallu attendre l’arbitrage opportun du Président de la République,
 
•    Les coopératives attendent la signature le plus rapidement possible d’un pacte avec le mouvement Hlm, qui doit être fondé sur la confiance réciproque. Je suis consciente de la suspicion qui émane des hautes autorités administratives quant à la capacité des Hlm à atteindre leurs objectifs pourtant infirmée par le passé. Ce pacte doit être suivi territoire par territoire, en examinant si l’objectif est atteint et pour quelle raison il ne l’est pas sans attendre le dernier moment pour se renvoyer la balle. La Fédération souhaite donc par ce pacte créer un nouveau lien entre l’USH, l’administration et les territoires et les acteurs coopératifs du logement Hlm.
 
Ce pacte soulève la préoccupation de l’accession sociale à la propriété. Le locatif social a fait partie d’un grand engagement, qui doit être concrétisé. L’accession sociale est dans un « entre-deux » et ne semble pas faire partie d’une des grandes priorités de l’Etat. Qu’il s’agisse de la question sociale ou de la mixité que les opérations d’accession peuvent apporter à certaines opérations, cette accession sociale devrait être fortement affichée comme une intention. De ce fait, la Fédération souhaiterait voir lever quelques blocages :
 
•    La clarification du fait que le PSLA bénéficiera bien de la TVA à taux réduit : le Président a axé son discours sur le logement social. Lorsque les représentants des Fédérations ont rencontré le Premier Ministre, ils lui ont indiqué que sans la TVA à 5 % sur le PSLA, une série d’opérations ne pourrait pas être suffisamment diversifiée pour produire du locatif. Le Premier Ministre a abondé dans ce sens. Le pacte ne pourra pas être signé si le PSLA ne bénéficie pas de la TVA à 5 %, car 50 % de la production des coopératives Hlm sont aujourd'hui en PSLA et une autre partie en ANRU, pour laquelle il est également fondamental d’avoir la TVA à 5 %,
 
•    Le bénéfice du PTZ : pour mener une opération de PLSA, le monteur de dossier qui reçoit un agrément PLSA doit savoir si dans un ou deux ans, lors du passage en accession, il pourra ou non bénéficier du PTZ. Il est annoncé que le PTZ a été voté jusqu’à une date butoir, dont l’échéance est plus courte que celle des deux ans nécessaires pour passer du PSLA à l’accession. De ce fait, de nombreuses banques refusent de s’engager. Une solution juridique est de considérer que le droit au PTZ est ouvert à partir du moment où le PLSA a été signé. Le nombre de PLSA par an ne dépasse pas les 10 000,
 
•    L’instruction des dossiers : la Caisse des Dépôts réalise des adjudications et décide d’en attribuer un certain nombre pour les PLS, mais tant que le délai n’est pas passé, le PSLA n’est pas débloqué. Ainsi, 200 opérations peuvent se retrouver bloquées en Ile-de-France dans l’attente de la décision d’adjudication par la Caisse des Dépôts. La Fédération demande à ce que le PSLA soit octroyé indépendamment de l’adjudication de la Caisse des Dépôts et d’imposer à la Caisse des Dépôts une plus grande vivacité et réactivité sur des sujets fondamentaux pour l’avenir du pays,
 
•    Le pilotage « au pré serré » doit être l’occasion de déterminer où les collectivités locales peuvent intervenir. Leur désengagement bloque les opérations qui ne peuvent pas se boucler. Il est nécessaire de trouver les moyens de compenser par une intervention publique l’éventuel défaut des collectivités locales,
 
•    Enfin, il est nécessaire de stopper les normes, même celles qui relèvent de la réglementation thermique. La RT 2012 est mis en œuvre. Le Directeur général DHUP a adressé une lettre à la Fédération afin de discuter des labels et indiquer que les coopératives seront consultées pour les nouvelles normes THPE RT 2012, mais les propositions finales sont exactement les mêmes que celles proposées avant la concertation, sans tenir compte des suggestions faites ! Cette démarche n’est pas conforme aux engagements de Madame la Ministre sur la concertation. Il est nécessaire de faire un « choc de pause » réglementaire et de vérifier la compatibilité entre les calculs théoriques et la réalité du terrain.
 
La Fédération a eu l’idée de créer une nouvelle catégorie de trophées qui s’ajouterait à ceux qu’elle décerne. Il s’agit d’attribuer un « parpaing d’or » à l’administration la plus féconde dans sa capacité à bloquer ce qui ne devrait pas l’être ! Je citerai l’exemple d’un lotissement dans un département qui bénéficie d’une voirie d’accès. Le responsable de la DREAL a refusé le permis de construire, considérant qu’il s’agit d’une construction et non d’un ouvrage alors qu’il ne s’agit pas d’une construction dans le règlement du lotissement. Le parpaing d’or pourrait développer un principe de précaution au sein des administrations publiques !
 
La Fédération propose de nouvelles pistes d’interventions :
 
•    Elle envisage toujours l’idée d’un produit coopératif d’accession coopérative à la propriété : un travail est mené avec les coopératives d’habitants dans les projets législatifs en cours,
 
•    Elle expérimente cette année le portage foncier collectif coopératif permettant de réaliser du foncier différé et la réalisation d’opérations d’accession. La Fédération a conclu un accord avec l’EPF Ile-de-France et la première opération sera présentée en juin. La mutualisation est mise en œuvre en plus de celle de l’USH, soutenue par la Fédération. Grâce au mouvement Hlm, la Fédération donnera deux fois l’aide à la pierre accordée par l’Etat en subventions. Cette mutualisation permettra d’atteindre les 150 000 logements visés. Les services de l’Etat et notamment Bercy doivent plutôt essayer de réduire les déficits publics lorsque des gaspillages ont lieu plutôt que d’essayer d’imposer des choses aux coopératives qui ne changeront rien, sauf produire des affichages financiers sans pertinence opérationnelle,
 
•    Par la SFHC, les coopératives Hlm ont l’ambition d’aider à l’accompagnement d’opérations plus complexes et d’aménagement,
 
•    Afin, la Fédération est très vigilante quant aux SIEG en Europe. L’administration française est plus royaliste que le roi ! Dans de nombreux pays européens, un opérateur SIEG est autorisé à opérer sur son cœur de cible et peut se voir confier des missions d’intérêt général à condition que les missions fiscalisées ne prennent pas le pas et ne menacent pas la logique des SIEG. S’agissant des syndics, les coopératives doivent avoir la possibilité d’intervenir sur les copropriétés car elles détiennent des copropriétés solidaires, sans dégradation. Elles acceptent de prendre en charge la gestion de certaines copropriétés dégradées. Afin d’avoir la masse critique permettant d’avoir des équipes opérationnelles et un rendement financier minimal, les coopératives ont parfois besoin de lots complémentaires. L’UNIS, l’organisation des opérateurs de syndic n’est absolument pas défavorable à l’entrée de la Fédération.
 
Nous remercions Madame la Ministre de sa venue. La Fédération concourt à la relance du logement social dans l’esprit du fait coopératif car elle estime que mutualiser est mieux que prélever et que partager solidairement et réaliser des péréquations est mieux qu’inventer des usines à gaz administratives qui ne fonctionnent pas. L’accession sociale à la propriété, même en période de crise, est un élément essentiel et une manière de préparer sa retraite, qui ne sera pas d’un niveau élevé pour tous.
Cécile DUFLOT, Ministre de l’Egalité des Territoires et du Logement
 
Je remercie la Présidente, les parlementaires et les élu(e)s de leur invitation. Un des bizutages associés au rôle de Ministre du Logement est celui de prendre la parole à la suite de Marie-Noëlle LIENEMANN ! Cette dernière a été Ministre, aussi je l’imagine tenir les mêmes propos sur l’administration et le « choc de pause » du temps de son mandat ministériel…
 
Je sais à quel point les coopératives jouent un rôle indispensable et sont également un vrai lieu d’innovation dans leur capacité à travailler avec les collectivités locales et avec les futurs habitants et leur capacité à inventer des réponses. Sur la question du foncier public, dont la loi a été définitivement validée fin janvier 2013, Bernard CAZENEUVE et moi-même accompagnerons dès le lendemain le Président de la République pour signer la première cession de foncier public à Caen. Il n’est pas dans l’état d’esprit du Gouvernement de considérer que les organismes Hlm, quels qu’ils soient, soient les « bagages accompagnés » des opérateurs privés sur ces opérations. Il s’agit au contraire de favoriser l’émergence de projets de grande qualité avec une priorité qui est celle du logement social, comme l’indique la loi et également de l’accession sociale. En effet, des décotes allant jusqu’à la gratuité pour la construction de logement locatif social et pour l’accession sociale sont prévues dans la loi qui s’applique désormais.
 
Par ailleurs, j’espère n’être plus qu’à quelques jours de la signature du pacte entre l’Etat et l’USH. Marie-Noëlle LIENEMANN a rappelé un certain nombre des travaux et des engagements du Gouvernement pris auprès des opérateurs Hlm. Cet engagement déterminé de la Ministre que je suis va de pair avec l’engagement déterminé que j’attends de la part des coopératives Hlm et de l’ensemble de l’USH pour atteindre ces objectifs de 150 000 logements sociaux par an, certes ambitieux mais atteignables, comme l’a confirmé Marie-Noëlle LIENEMANN. Cet objectif doit être atteint non pour tenir des promesses de campagne mais pour proposer un logement aux millions de familles qui attendent ce lieu qui permettra leur épanouissement personnel et collectif, l’éducation de leurs enfants. J’insiste sur le fait que le logement est un bien de première nécessité, qui nécessite une régulation et un encadrement. Un travail est en effet réalisé sur l’encadrement des loyers et sur une garantie universelle des loyers dans le cadre d’une politique globale à destination du logement social mais aussi du logement privé.
 
C’est bien l’ensemble de la « biodiversité » du logement qu’il est nécessaire de prendre en compte pour s’attaquer résolument à la crise du logement.
 
Le logement est une grande priorité du quinquennat et des habitants de ce pays. Les journalistes étrangers ne comprennent pas comment, dans un pays de 66 millions d’habitants, 3,5 millions de personnes sont encore aujourd'hui concernées par le mal-logement. Dans un moment de crise où l’incertitude pèse sur les épaules de nombreuses familles, il est du devoir du Gouvernement de s’attaquer résolument à la crise du logement par tous les moyens nécessaires.
 
Je ne répondrai pas précisément aujourd'hui aux demandes formulées par Marie-Noëlle LIENEMANN en matière de PLSA et à la question des zones ANRU. J’assure toutefois que mon attention est forte sur ces sujets et que les débats nécessaires se tiennent au sein du Gouvernement dans une période où l’usage des fonds publics doit être le plus efficace possible. Je sais à quel point le rôle des PSLA est décisif dans la construction de ce parc de logements équilibré.
 
Pour atteindre cet objectif, la détermination des acteurs de terrain et du Gouvernement est essentielle. Je suis consciente du besoin de confiance renouvelée et vérifiée à chaque instant, qui n’empêche pas la franchise respective et réciproque. Parfois, le secteur du logement social peut ne pas répondre avec la même rapidité et la même vitesse que ce que l’on pourrait espérer. L’engagement est néanmoins fort et ce pacte de confiance doit être établi. C’est le sens des premiers signes qui ont été donnés, tels que le Plan d’investissement pour le logement annoncé le 21 mars dernier par le Président de la République sur des questions claires et des moyens associés, notamment la mobilisation exceptionnelle d’Action Logement et la volonté d’aller vers une logique de simplification des relations entre les acteurs d’Action Logement et les acteurs du monde Hlm pour que les financements soient liés et donc facilement disponibles. Ce travail a déjà été mené et l’ensemble des éléments permettant de signer ce pacte durable est disponible.
 
Le vote de la loi d’augmentation du nombre de logements sociaux à 25 % dans les communes de plus de 3 500 habitants est un signal important. Les oppositions constatées ces dernières années comme la forte tension ressentie au moment du vote de la loi SRU n’ont pas été de même nature. Cela est un très bon signe car la nécessité de la présence de logement social en proportion importante semble acceptée dans la plupart des villes. C’est de la mixité des parcs que vient l’équilibre des collectivités et la diversité doit se retrouver non seulement à l’échelle de la commune mais également des quartiers voire des immeubles. La règle des trois tiers bâtis et la volonté d’intégrer du logement social dans l’ensemble des constructions dépassant un certain nombre de logements a déjà été initiée dans certaines collectivités locales. Elle montrera une nouvelle étape du rôle de logement social, marqué tout au long de son histoire par une adaptation au monde.
 
J’ai fait part d’un certain nombre de preuves à l’assemblée et invite les coopératives Hlm à travailler désormais d’arrache-pied pour atteindre ces objectifs, qui sont d’offrir des logements accessibles aux ménages les plus modestes. Voilà le rôle simplement énoncé du logement social.
 
J’ai demandé qu’il n’y ait pas de nouvelle norme technique de construction pendant deux ans, car je comprends que les opérateurs ont besoin de stabilité pour déployer leurs projets. Ils sont tout à fait capables de s’adapter à de nouveaux dispositifs à condition que ces derniers ne changent pas en permanence. La question du dispositif HPE permettra d’obtenir un bonus de financement et il est utile pour les opérateurs de pouvoir aboutir sur ce dossier, qui permettra un meilleur financement des opérations.
 
J’invite les coopératives à y participer et veillerai à ce que l’état d’esprit soit ouvert et collaboratif. Il faut faire confiance aux opérateurs, aux techniciens et aux architectes, à ceux qui travaillent sur le terrain pour aller parfois au-delà de ce qui est demandé de manière plus inventive voire moins coûteuse.
 
Ma volonté n’est pas de normaliser mais de faire en sorte, dans le cadre d’une véritable transition énergétique, d’être extrêmement vigilant sur la qualité des logements construits tout en laissant une part à la capacité d’inventivité et d’utilisation des ressources, techniques de construction ou matériaux locaux. Cette inventivité et cette spécificité locale que permettent les petites structures – je suis à cet effet favorable à la diversité des tailles de structures – est décisive.
 
Le partenariat entre les coopératives Hlm et le Gouvernement doit s’inscrire dans un triptyque très simple : « produire plus, c’est nécessaire », « produire mieux, c’est possible » et « produire partout, c’est ce que savent faire les coopératives Hlm ». Ma présence vise à encourager les différents acteurs à poursuivre dans ce travail ambitieux de franchise. La mission que remplissent les opérateurs du logement social est véritablement d’intérêt général et peut être un vrai moment de bonheur, en sachant qu’ils construisent les lieux qui permettront à des familles et à des enfants de s’épanouir.